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Bonjour, bonjour ! Ici c’est Sam. Oui, c’est moi la femme qui porte des escarpins roses. J’ignore d’ailleurs pourquoi Jérémy en fait tout un plat, ce ne sont que des chaussures après tout. Bref…

C’est moi qui ai pris le stylo aujourd’hui car Jérémy tenait à ce que je vous parle de mon rôle de tata que je prends très à cœur. Bon d’accord, la vraie vérité, c’est que votre écrivain préféré est cloué au lit avec un grippe pas possible ! Ha ha ha !

Il ne voulait pas vraiment que je prenne sa place pour écrire un article, mais il s’en voulait beaucoup de ne pas pouvoir vous proposer un nouveau souvenir ce vendredi.

Alors… Me voici au clavier pour la première fois !

Je vais donc en profiter pour vous raconter un événement auquel mon fiancé n’a pas participé, pour changer.

Tout a commencé lorsque Louisa, ma sœur, m’a gentiment demandé, pour ne pas dire expressément ordonner, de garder Léo pendant plusieurs heures. Léo est mon neveu, son fils.

Personnellement, je n’étais pas très chaude pour jouer la nounou, je n’ai jamais gardé d’enfant, encore moins un bébé d’à peine trois mois. Mais Louisa en avait décidé autrement.

« Lorsque je me gare devant la maison de Louisa, elle sort immédiatement, comme si elle me guettait par la fenêtre. Elle court vers moi, ses chaussons encore aux pieds, un air affolé sur le visage. Ma sœur est une vraie comédienne, il faut le dire. Son terrible problème qu’elle ne peut pas repousser n’est qu’un simple rendez-vous chez le dentiste qu’elle n’a pas voulu décaler. Son mari, Tom est retenu à son travail pour une réunion importante.

J’ai tenté de la convaincre de confier le petit Léo à nos parents, mais le hasard fait bien les choses, nos parents sont tous les deux à l’extérieur de la ville, partis quelques jours en amoureux. Je les soupçonne presque de me faire ce coup-là pour me préparer à la maternité. Mais après ma petite frayeur de Noël, faire un enfant n’est vraiment pas à l’ordre du jour. J’ai déjà du mal à me remettre de cette fausse grossesse, alors je ne suis pas certaine que mon cœur puisse se remettre d’une fausse nouvelle joie si vite.

— Te voilà enfin, s’exclame-t-elle en faisant trainer ses pantoufles sur le trottoir. Je dois partir sinon je vais être en retard.

— Peut-être que tu pourrais déjà penser à mettre des chaussures, je réponds en claquant la portière de ma voiture.

Elle baisse la tête et observe ses pieds un instant, en silence.

— Louisa, tout va bien ?

Ma sœur semble un peu à l’ouest.

— Hein ? Euh oui, je suis juste un peu fatiguée. Léo n’a pas beaucoup dormi cette nuit. Mais ça va.

Je fronce les sourcils en observant son visage un peu plus pâle que d’ordinaire, et ces cernes que je n’avais pas remarqués plus tôt. Ma sœur semble épuisée. Pourquoi je ne l’avais pas vu avant ? Est-ce que je suis vraiment trop absorbée par le magasin et mon nouveau statut de fiancée ?

Je jette un coup d’œil discret à la bague qui orne mon annulaire gauche.

— Tu as besoin de sommeil. Tu es sûre que tu veux aller chez le dentiste ? Maintenant que je suis là pour garder Léo, tu pourrais peut-être dormir un peu.

Elle secoue la tête et son chignon termine de se défaire complètement. Ses cheveux bouclés lui retombent devant les yeux.

— Non, non j’ai besoin d’aller chez le dentiste, répond-elle en se baissant pour ramasser l’élastique à cheveux qui a glissé sur le trottoir.

— Très bien, comme tu veux.

Je la suis à l’intérieur de la maison. Je découvre surprise que le salon n’est pas aussi en ordre que d’ordinaire. Visiblement, ma sœur a plus besoin d’aide que ce que je croyais. Une pile de linge est jetée sur le canapé ; son assiette du déjeuner est encore sur la table, pleine, et une couche de poussières commencent à s’amonceler sur le meuble de l’entrée.

Louisa se tourne soudainement vers moi, les yeux grands ouverts.

— Ça va aller avec Léo ?

Comme s’il avait entendu la voix de sa mère, le bébé se met à pleurer. Enfin, en fait ça ressemble plutôt à des cris de torture.

Louisa soupire et je vois ses épaules s’affaisser. Un instant, je crains qu’elle ne se mette à pleurer. Mais elle inspire profondément et plaque un sourire sur son visage. Forcé le sourire, bien évidemment. Je ressens alors une sourde inquiétude pour ma sœur. Mon estomac se serre. Je vais en parler avec notre mère pour voir comment nous pouvons les aider, elle et Tom. À aucun moment, Louisa ne m’a dit que le bébé l’épuisait à ce point.

— Mais oui, ne t’en fait pas, je tente de la rassurer. Ce n’est qu’un tout petit bébé, il ne va pas retourner toute la maison.

Je souris pour la convaincre que je vais gérer, même si je n’en suis pas tout à fait certaine moi-même.

— OK.

Elle attrape une veste en jean sur le porte-manteau et l’enfile, les yeux dans le vague. Est-ce vraiment une bonne idée de la laisser conduire dans cet état ? Même si le cabinet du dentiste n’est qu’à quelques kilomètres.

— Louisa ?

— Hum ?

— Est-ce que tu veux que je t’emmène en voiture ?

Elle ouvre la bouche puis la referme, et répond :

— Et Léo ?

— On pourrait prendre ta voiture, comme ça on emmène le petit avec nous, et c’est moi qui conduis. Excuse-moi de te dire ça, mais tu sembles sur le point de t’évanouir de fatigue. Je préfèrerai conduire. On te dépose et on revient te chercher, tu n’auras qu’à m’appeler.

Elle hausse les épaules et lève la tête vers l’étage ou Léo s’époumonne. Elle pose son pied encore chaussé de pantoufles sur la première marche pour aller le chercher, mais je l’en empêche en posant une main sur son épaule.

— Laisse, j’y vais. Finis de te préparer.

Je grimpe à l’étage et trottine jusqu’à la chambre de mon neveu si craquant. Allongé dans son petit lit, le visage de Léo est tout rouge. Ses joues bien rebondies sont trempées de larmes et mon cœur de tata fond aussitôt. Quand il me voit, il tente ses bras potelés dans ma direction et un sourire niai s’étale sur mon visage.

— Coucou toi, je murmure. Tu es réveillé. Oh oui, c’est un gros chagrin. Viens avec tata.

Je la prends contre moi et il s’arrête de pleurer. C’est un bon début !

Nous rejoignons sa mère en bas, toujours en chaussons, mais avec sa veste et son sac à main sur l’épaule.

— Louisa, tes chaussures !

— Oh ! Oui, tu as raison. Le dentiste risque de me regarder bizarrement si je débarque en chaussons.

Elle rit et je retrouve un instant ma sœur. Je la regarde enfiler une paire de basket puis je baisse la tête vers le petit Léo qui m’observe, ses grands yeux bleus rivés sur mon visage comme si c’était la première fois qu’il voyait un être humain.

— Après ton rendez-vous chez le dentiste, je me disais que tu pourrais peut-être aller faire une sieste chez Papa et Maman. Profites-en pour te reposer, tu en as bien besoin, on dirait.

À ma grande surprise, ma sœur ne dément pas, elle, la super woman, qui assure en tout !

— C’est vrai que je n’ai pas les yeux en face des trous en ce moment, mais ça va.

Ah ! Je me disais aussi !

— Louisa, regarde comme le petit Léo adore sa tata ! Tu peux t’absenter quelques heures, je t’assure que nous allons survivre. C’est promis.

Elle nous regarde chacun notre tour, puis soupire à nouveau. Je ne crois pas l’avoir jamais vu soupirer autant de fois en si peu de temps.

— Tu as probablement raison.

— OK ! Alors on y va ?

Elle secoue la tête. Pendant un instant, j’ai cru que j’avais réussi à la convaincre.

— Non, j’y vais seule. Vous, vous restez bien au chaud ici. Il fait froid aujourd’hui, surtout pour un petit bébé.

Elle s’approche de son fils et l’embrasse tendrement. Est-ce des larmes qui font briller ses yeux ou juste la fatigue ?

J’attends qu’elle finisse ses au revoir, mais elle traine.

— Louisa ?

— C’est la première fois que je vais le laisser aussi longtemps.

Ah ! Je vois.

— Imagine-toi que tu le mets au lit et que tu reviens le chercher après sa sieste.

Elle s’écarte enfin et fronce les sourcils.

— Très drôle ! Appelle-moi s’il y a quoi que ce soit. Le numéro du pédiatre est près du téléphone et je…

D’une main, je la pousse vers la porte d’entrée.

— Ça va aller, je suis une grande fille. Vas-y.

Elle marmonne encore quelques recommandations et je claque la porte pour qu’elle parte enfin avant d’être vraiment très en retard.

Je baisse le regard vers le petit être qui me dévisage toujours.

— Voilà ta maman est partie. On va rester tous les deux quelques heures. Juste Léo et tata.

Mon neveu remue ses bras dans tous les sens comme pour acquiescer et je lui souris, certaine que tout va se passer au mieux. Je suis une tata qui va assurer et Louisa va pouvoir dormir un peu.

Le seul petit problème, c’est que Léo se met à pleurer cinq minutes à peine après que la voiture de sa mère a quittée l’allée devant la maison.

Je m’efforce de ne pas paniquer et pense à toutes les recommandations que Louisa m’a données.

Je commence par le bercer en faisant des allées et venues dans le salon. Mais il s’époumone de plus belle. Je l’allonge sur le canapé et dégrafe son body pour vérifier sa couche. Je soupire presque de soulagement quand je constate que sa couche est pleine. Nous montons à l’étage et je m’applique à le changer. Je dois m’y reprendre à deux fois pour bien attacher la couche, mais finalement, je suis plutôt satisfaite de moi. Je le redresse et la couche reste bien en place. Je souris en le rhabillant, certaine qu’il va cesser de pleurer maintenant qu’il a les fesses bien au sec.

Mais non !

Il continue à crier comme s’il vivait le pire drame de toute sa vie. Je reprends mes cent pas dans le salon. Sans effet. Je retire mes escarpins noirs et marche pieds nus en me disant que le bruit de mes talons lui faisait peut-être mal aux oreilles.

Un instant, il se calme. Rien qu’un instant. La minute suivante, il hurle de plus belle.

Soudain, une idée surgit. Peut-être a-t-il faim.

Je me précipite dans la cuisine pour faire réchauffer l’un des biberons préparés par ma sœur. Mais lorsque je le lui présente, il le refuse. Il remue tellement ses petits bras que le biberon manque de m’échapper des mains et de s’écraser sur le sol.

À cet instant, mon téléphone portable vibre dans la poche arrière de mon jean. Je décroche malgré les cris qui font souffrir mes tympans.

— Coucou ! je m’écrie pour que mon fiancé m’entende par-dessus les pleurs.

— Oula ! s’exclame-t-il. On dirait que Léo n’est pas content.

Je grimace et continue de bercer bébé d’une main.

— Oui. Je ne sais pas ce qu’il a ! Jérémy, je commence à paniquer ! Louisa n’est partie que depuis une demi-heure et Léo n’a pas cessé de pleurer. J’ai changé sa couche, j’ai tenté de lui donner un biberon et je ne cesse de le bercer, mais rien ne marche. Je ne sais plus quoi faire ! Et s’il continue à pleurer jusqu’à ce que sa mère rentre ? En plus, je lui ai proposé d’aller faire une sieste chez nos parents après son rendez-vous, parce qu’elle était vraiment épuisée.

— Commence par te calmer, me répond mon fiancé d’une voix calme. Tout va bien se passer, tu verras. Peut-être qu’il sent que tu es stressée.

La voix de mon amoureux me fait presque monter les larmes aux yeux. Il me manque tellement à cet instant précis. Il est reparti chez lui pour travailler sur son fichu roman et nous ne nous sommes pas vus depuis presque une semaine. Si seulement il pouvait être là tout de suite, je suis certaine que je serais moins stressée avec lui à mes côtés.

— C’est facile à dire. Il me hurle dans les oreilles !

Il marque une pause et je crains qu’il ne m’écoute pas, mais il reprend :

— Si je pouvais je prendrais le premier train pour venir t’aider, mais même si je le faisais le temps que j’arrive jusqu’à toi, ta sœur serait rentrée. Tu veux que j’appelle Elsa pour lui demander quelques conseils ?

Son soutien me fait chaud au cœur. C’est dingue comme j’aime ce type.

— Tu as essayé de lui donner son doudou ? Ou sa tétine ? Est-ce qu’il en a une ?

Bonne question.

— En fait, j’en sais rien.

Je monte dans sa chambre et me précipite vers son lit. J’attrape le petit ourson qui y traine et le tend à mon neveu qui ne daigne même pas le regarder. Je récupère ensuite la tétine et la lui fourre dans la bouche.

— Non, ça ne fonctionne pas, je gémis alors que Léo recrache la tétine. Bon sang, qu’est-ce qui m’a pris d’accepter de garder un bébé ? Je n’ai jamais fait ça ! Je ne sais pas comment ça fonctionne ce genre de choses !

— Calme-toi ma chérie. Tu t’en sors très bien. Parfois les bébés ont simplement besoin de pleurer. Il va finir par se calmer, tu verras.

— Oui, mais dans combien de temps ?

Je tente de le coucher dans son lit en me disant que l’odeur familière le calmera peut-être, en vain.

— Tu crois que c’est parce qu’il a compris que sa mère était partie ? je demande à mon fiancé.

— Peut-être. Les bébés sentent ce genre de choses.

— Alors je suis foutue.

Finalement, c’est mieux que nous n’ayons pas eu de bébé tout de suite, je ne peux m’empêcher de penser, j’aurai fait une piètre mère. Mais je garde ces pensées pour moi.

— Ta sœur ne t’a pas dit ce qu’elle faisait pour le calmer ?

Je secoue la tête même s’il ne peut pas me voir.

— Je ne suis pas certaine que ma sœur ait la solution. Jérémy, tu l’aurais vu ! Je n’ai pas reconnu ma propre sœur. Elle était si épuisée qu’elle a failli partir chez le dentiste en chausson. Elle est au bout du rouleau. Je m’en veux de ne pas l’avoir remarqué plus tôt.

— Ce n’est pas ta faute, tu es pas mal occupée avec la boutique.

— Je sais, mais ça n’excuse rien.

Je ferme les yeux alors que Léo crie plus fort, comme s’il n’aimait pas que mon attention ne soit pas entièrement dirigée sur sa personne.

À l’autre bout du fil, j’entends Jérémy protester.

— Je comprends que tu paniques ma puce.

Merci, mais ça, ça ne m’aide pas vraiment !

— Bon je crois que je vais te laisser. J’ai du mal à gérer le téléphone et le bébé.

— Tu es sûre ?

Non, mais je ne peux pas discuter et tenter de comprendre pourquoi mon neveu hurle.

— Oui, oui, ça va aller.

— OK, comme tu veux. Je te rappelle un peu plus tard pour vérifier que tu as survécu, pouffe-t-il avant de raccrocher rapidement.

Il a eu raison, j’aurai pu l’insulter de se moquer de moi dans une situation pareille. Mais il n’a pas tout à fait tort, peut-être que Léo sent que je suis stressée.

Je réfléchis une minute et le pose dans son lit, malgré ses protestations. Je tape rapidement sur un moteur de recherche « comment calmer un bébé qui pleure » et je lis plusieurs des réponses que je trouve. Il y en a une qui me saute aux yeux parce que j’en ai déjà entendu parler.

J’attrape le bébé et redescend. Je cherche et trouve l’aspirateur dans le placard de l’entrée. Il parait que l’aspirateur calme certains bébés. Qui ne tente rien !

Mais là aussi, c’est un échec total. Je sens la panique me serrer l’estomac. Je ne vais pas réussir à calmer ce pauvre bébé, je suis une mauvaise tata ! Est-ce que ça peut être considéré comme de la maltraitance de laisser pleurer un bébé ? J’en suis presque convaincue. C’est certain, ce petit va me détester, il ne m’aimera jamais. Je serais la tata qui n’a même pas réussi à s’occuper de lui lorsqu’il était bébé et ça me suivra jusqu’à la fin de mes jours.

Je sais que je suis mélodramatique, mais je m’en fiche. J’ai un bébé qui hurle dans mes bras et je me sens impuissante.

Alors je m’assieds sur le canapé, le bébé serré contre moi et je lève les yeux vers la petite horloge dorée accrochée au-dessus de la porte.

Louisa est partie depuis quarante-cinq minutes. Trois quart d’heure que le bébé pleure et je n’ai même pas réussi à la calmer une minute. Je ne ferais jamais une bonne mère.

Je me sens tellement coupable pour le pauvre petit qui hurle à pleins poumons. J’aimerais tellement le comprendre et lui apporter ce dont il a besoin. Mais après avoir tout tenté, je ne sais plus quoi faire. Alors je me laisse aller moi aussi, et je pleure. En silence, je laisse les larmes couler sur mes joues en regardant mon neveu.

— Je suis désolée Léo, je ne sais pas comment t’aider, je murmure désespérée.

Trois heures plus tard, je suis réveillée par la voix de ma sœur. Je me redresse brusquement, le cœur battant à toute vitesse. Le bébé ?

Léo est endormi contre moi, son visage joufflu enfin paisible. Je souffle de soulagement. Un instant, j’ai cru que je m’étais endormie en laissant le bébé sans surveillance, puis tout me revient en mémoire.

Je lève les yeux vers ma sœur qui me sourit. Elle a meilleure mine, c’est indéniable.

— Ça va ? murmure-t-elle en désignant son fils d’un mouvement du menton.

Je hoche la tête.

— Et toi ? je demande sur le même ton pour ne pas risquer de réveiller Léo.

Elle prend une profonde inspiration et lève les yeux au ciel.

— Oh ! Oui !

Avec délicatesse, elle récupère son bébé sans le réveiller, comme seule une mère sait le faire. Et elle le monte dans son lit.

Je me lève et me dégourdis les bras. Je n’avais pas conscience que je serrais le bébé si fort contre moi avant de sentir des crampes.

— Alors tout s’est bien déroulée ? me demande ma sœur quand elle me rejoint.

Elle retire ses chaussures et sa veste, et s’assied à mes côtés sur le canapé, ses jambes repliées sous elle.

— Je ne dirais pas ça, je réponds en secouant la tête. Mais tout s’est bien fini, donc c’est le principal.

— Il a pleuré, hein ?

— Oh que oui ! Et pas qu’un peu.

— Je suis désolée, j’aurai dû te prévenir. Léo pleure beaucoup en ce moment. Le pédiatre dit qu’il va bien et que ce n’est que passager. Mais il y a des jours où je ne sais plus comment le calmer. Je craignais que tu ne veuilles plus le garder si je te disais comme il est insupportable parfois.

Cet aveu me soulage. Je ne suis peut-être pas aussi mauvaise que je l’aurai cru.

— Oh ! bon sang, je suis une mère horrible de dire ça de mon bébé.

Je pose une main sur son épaule.

— Non, c’est faux. Tu es une super maman, Louisa. N’en doute jamais.

Elle essuie une larme au coin de son œil gauche.

— Alors, comment tu as fait pour le calmer ? me demande-t-elle curieuse, comme si je détenais un merveilleux secret.

Si elle savait !

— J’ai pleuré, je réponds.

Louisa tourne la tête vers moi, ses yeux grands ouverts par la surprise.

— Hein ?

Je ris, moi-même étonnée de ce que je viens d’avouer.

— J’étais désespérée, je ne savais plus quoi faire et j’étais paniquée de ne pas réussir à le calmer. Alors je me suis mise à pleurer et je me suis excusée de ne pas réussir à lui apporter ce dont il avait besoin. Et crois-moi ou non, il a cessé de pleurer, a ouvert de grands ouverts et s’est mis à m’observer. Je n’en revenais pas. Alors j’ai continué à lui parler et… on a fini par s’endormir.

Louisa réfléchit un instant.

— Alors c’est ça qu’il veut ?

Elle rit à son tour.

— Il suffisait de le demander, je peux pleurer aussi souvent qu’il le veut.

Nous riions un moment.

— Et toi alors, tu as réussi à te reposer ? Tu as meilleure mine.

— Oui, et merci pour ça Sam. Tu n’imaginais pas comme j’en avais besoin. Entre mes maux de dents et le manque de sommeil, je crois bien que j’aurai pu m’écrouler.

— Je pense que tu étais à deux doigts.

Nous riions à nouveau et Louisa se lève.

— Un petit café ?

J’acquiesce et la suit dans la cuisine.

Peut-être que je ne ferais pas une si mauvaise mère finalement, quand le moment sera venu bien sûr.

Mon téléphone vibre et je regarde le nom qui s’affiche.

— Tu ne réponds pas ? demande Louisa en me voyant ranger le téléphone dans ma poche.

Je secoue la tête. Mon fiancé s’est moqué de moi tout à l’heure, alors que j’étais en pleine crise, il peut bien patienter un peu.

Et je m’assieds pour passer un moment avec ma sœur. Entre son bébé et ma boutique, nous n’avons plus vraiment de temps pour papoter simplement autour d’un café.

Je me promets de garder du temps pour ma famille et de garder un œil sur ma sœur. Maintenant que je sais comme calmer le petit Léo, je pourrais lui proposer de le garder à nouveau pour qu’elle puisse prendre du temps pour elle et se reposer.

Enfin… peut-être… »

Samantha, la femme aux escarpins roses.